Voici la deuxième partie de l’interview de Bruce Ribay pour Noma édition. Il va nous livrer ses sources d’inspiration et son avis sur la décoration et le modulaire.
Comment définissez-vous votre métier d’éditeur, quelles sont les qualités requises ?
La résilience. Nous ne connaissions pas ce métier et devions donc l’apprendre dans un contexte compliqué. Nous nous sommes lancés pendant la covid et ne savions pas si la difficulté est due à la crise sanitaire ou au fait que nous ne savons pas bien faire notre métier. C’est probablement les deux.
Il faut de la patience, de l’énergie, du réseau etc. Les qualités requises sont similaires pour n’importe quelle création de boîte quand on débute. Nous sommes chefs d’orchestre. La qualité que nous devons mettre en avant est la relation humaine. Nous devons bien nous entendre avec l’orchestre : les designers, les fabricants etc.
Ce métier intègre beaucoup de métiers différents. Il faut donc être polyvalent et ouvert d’esprit. Ce n’est pas toujours facile.
Pensez-vous que votre métier va devoir se réinventer ? Notamment avec la pandémie que nous traversons ?
Oui et non. Le côté négatif de la crise est cet arrêt de l’économie et un contexte commercial compliqué. Lorsque nous avons lancé le projet il y a trois ans, nous voulions montrer que le “consommer mieux” n’est pas un effet de mode. Cela existait déjà il y a quinze ans. Aujourd’hui, c’est une priorité qui incite les personnes à consommer différemment. Il n’y a pas une journée où nous n’entendons pas parler de recyclage, de bien consommer etc. Cela nous rassure. Nous avons une proposition qui a du sens et qui a une vraie raison d’être aujourd’hui. Davantage sur notre marché. Nous sommes les seuls à proposer des produits de ce type. Cela demande beaucoup de développements. Il ne suffit pas juste de trouver du plastique et un designer.
Lorsqu’on voit un produit chez NOMA on ne peut pas se douter que tout est fait à partir de matériaux recyclés. Nous ne changeons donc pas notre direction. Si nous pouvions changer des choses, nous aurions plus de volume et nous baisserions les prix. Nous savons que nous sommes sur une gamme de prix élevé et que cela peut être un frein commercial. Aujourd’hui, nous proposons nos produits au bon prix. Nous avons un design pertinent, des produits durables et fabriqués en France à partir de matières recyclées. Étant une jeune entreprise, nous travaillons en petite série. En France, dans le domaine de la décoration, les marques font appel à des retaillers, qui font augmenter les marges. De ce fait les produits sont de plus en plus chers. Lancer une marque ne se fait pas en six mois. Pour le moment, nous continuons dans cette direction.
Selon vous, la décoration et le mobilier ont-ils un impact sur nos humeurs et notre bien-être ?
Je pense qu'inconsciemment oui. On le voit bien quand nous sommes au bureau ou en télétravail. Si nous n’avons pas une bonne chaise pour s’asseoir, nous ne sommes pas bien. Concernant la décoration c’est pour moi un bien-être visuel. Lorsque nous avons de beaux objets, cela contribue au bien-être. De plus, si le mobilier est confortable, cela va de pair. C’est la même chose pour la literie par exemple. Donc oui c’est important.
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Avez-vous un projet, personnel et/ou professionnel, que vous rêvez de réaliser un jour ?
Au niveau professionnel j’avais envie de créer une marque de meubles. Avec Guillaume, nous sommes en train de réaliser ce rêve. Nous avons beaucoup d’envies pour NOMA comme dessiner et éditer un produit lumineux. Nous savons que la problématique sur ce type de produit n’est pas le joli abat-jour en matière recyclée mais comment travailler l’électronique. Réussir à travailler avec de l’électronique recyclé est un vrai sujet et sur lequel nous travaillons. Cela fait partie des sujets un peu difficiles sur lesquels nous cherchons des solutions. Côté personnel, tout se passe bien. J’essaye d’équilibrer la vie pro et perso.
Quelles sont vos sources d’inspiration ? Avez-vous des recommandations de comptes sur les réseaux sociaux ou de marques que vous appréciez ?
Nos inspirations tournent autour de cette notion de beaux objets, bien que cela soit subjectif. Nous sommes très curieux et nous inspirons de ce qui nous touche en termes de design. Nous n’avons pas de limites. Avec Guillaume, nous avons des goûts similaires. Cela rend la tâche plus facile. Nous sommes sensibles aux designs originaux et décalés. Nous essayons de les mettre dans nos collections mais ce n’est pas forcément ce qui sera mis en avant.
Aujourd’hui, nous avons des designs assez intemporels. Nous travaillons avec tous types de matières. Il est vrai que pour notre première collection, nous avons beaucoup utilisé le plastique. Aujourd’hui, nous allons développer de nouvelles choses sur différentes matières. Le principal est d’aimer ce que l’on propose et que nos produits répondent à toutes nos contraintes. Nous nous inspirons des réseaux sociaux et de la presse. Sur internet c’est un peu une veille permanente sur ce type de questionnement.
Pour les marques, nous aimons beaucoup “Eaux fragiles”. Ils font de la vaisselle. Il y a aussi une marque française qui fait du mobilier en Afrique à partir de métal qu’elle fait couler. C’est assez intéressant. Il y a aussi des marques de matières que l’on aime bien comme “Le Pavé” à Paris. Ils viennent récupérer des déchets plastiques pour en faire des plaques et nous achetons pour les transformer. Ce sont des jeunes architectes diplômés qui investissent beaucoup de temps et d’argent.
Nous essayons de collaborer avec des boîtes françaises. Il y a “SCALE” qui fait une matière à partir d’écailles de poissons. Nous avons aussi “Seconde Vie” qui récupère des anciens matelas pour en faire des blocs de mousse recyclés. Ce sont des initiatives françaises de récupération de déchets français avec une production de matière primaire et secondaire. Nous travaillons également avec l’atelier Emmaüs qui développe un produit à partir de bois de récupération. C’est un atelier d’insertion. Le volet social est très pertinent pour nous.
Et enfin, que pensez-vous du Pegboard et du design modulaire ? Faut-il préférer un objet mono fonction ? Ou le multifonction apporte-t-il des solutions en phase avec nos modes de vie ?
Nous travaillons plutôt la mono fonction. Cependant, pour un meuble de rangement ou des étagères, le modulaire est utile. Mais, pour de l’assise ou de la table ce sont des sujets qui ne sont pas faciles. Cela ne nous empêche pas de sortir en Septembre une table qui n’est pas modulaire mais sur laquelle on a travaillé la double fonction. Une table pour manger mais aussi une table sur laquelle on peut télétravailleur. C’est une table avec un double plateau qui permet de ranger nos affaires de travail. Lorsqu’on veut manger, on peut y ranger toutes nos affaires
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Propos recueillis par Clara Didier
Mise en forme par Coralie Mottu
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